Des blocs de 20 centimètres d’épaisseur ont été collectés pour la construction de la passerelle. L’ajout de mortiers aux joints a permis de compenser les variations dimensionnelles des pièces. Image : Smart Living Lab

La pratique du réemploi impose un nouveau processus de conception, remplaçant la fabrication sur-mesure par la sélection d’un stock de composants donnés aux propriétés variées et partiellement maîtrisées. Image : Smart Living Lab

Smart Living Lab : Construire en béton… sans couler de béton - une passerelle piétonne à partir deblocs de béton issus de murs initialement destinés à être démolis

(EPFL) Des chercheuses et chercheurs de l’EPFL ont construit une passerelle piétonne à partir de murs d’un bâtiment en rénovation. Les blocs en béton armé ont été sciés un à un sur place puis réassemblés en un arc précontraint. Une première mondiale qui vise à réduire drastiquement l’impact environnemental de l’industrie de la construction en y appliquant les principes de l’économie circulaire. (Text auf Deutsch >>)


«Il y a de nombreuses craintes qui freinent le réemploi du béton. Nous voulons montrer que ces craintes sont majoritairement infondées et que les éléments de réemploi sont fiables et tout aussi utiles que les neufs.». Corentin Fivet, professeur assistant tenure track à l’EPFL, explore depuis des années le potentiel de l’économie circulaire dans la construction. Après le métal, son équipe du Laboratoire d’exploration structurale (SXL), basé au Smart Living Lab de Fribourg, s’est attaquée au réemploi du béton. L’objectif: construire une passerelle piétonne de 10 mètres de portée à partir de 25 blocs de béton issus de murs initialement destinés à être démolis. Le résultat final a été soumis à un essai de charge et est prêt à l’emploi. Son vernissage est prévu le 11 octobre, à la Halle Bleue du Smart Living Lab.

Nouveau processus de conception
Jan Brütting, récent docteur du SXL et instigateur de ce projet, y a consacré son post-doctorat aux côtés de Maléna Bastien Masse, qui poursuit les recherches dans le cadre de son propre post-doctorat. La pratique du réemploi impose un nouveau processus de conception, remplaçant la fabrication sur-mesure par la sélection d’un stock de composants donnés aux propriétés variées et partiellement maîtrisées. Afin de tirer parti de cette nouvelle complexité, le SXL a récemment développé un outil numérique pour automatiser la sélection d’éléments issus d’un stock, tout en minimisant l’empreinte environnementale de la nouvelle structure.

La preuve par la pratique
Dans la pratique cependant, le réemploi est souvent perçu comme un risque supplémentaire. Les scientifiques de l’EPFL n’y voient pourtant que des avantages. Afin d’éprouver rapidement cette assertion, le projet de prototype de passerelle a été lancé. «On s’est donné deux mois pour trouver un bâtiment source dans la région et une entreprise de démolition qui serait motivée à travailler avec nous», explique Maléna Bastien Masse. L’entreprise Diamcoupe se montre alors intéressée à participer à l’expérience. Un chantier de transformation d’un immeuble construit il y a moins de 10 ans leur paraît une opportunité idéale pour extraire les éléments de béton souhaités. «On leur a demandé de scier les pièces aux bonnes dimensions et de percer les blocs d’un bord à l’autre, pour que nous puissions ensuite passer les câbles de précontrainte fournis par l’entreprise Freyssinet et nécessaires à la construction de l’arc.»

Des blocs de 20 centimètres d’épaisseur ont ainsi été collectés pour la construction de la passerelle. L’ajout de mortiers aux joints a permis de compenser les variations dimensionnelles des pièces, facteur inhérent aux stratégies de réemploi. «L’arc est idéal pour réutiliser ces blocs de béton, puisqu’ils seront sollicités en compression uniquement», précise Jan Brütting.

Un champ de recherche fertile
Ce prototype, soutenu par une bourse ENAC Innovation Seed Grant, ouvre un champ de recherche fertile pour le Laboratoire SXL, inscrit dans la Faculté de l’environnement naturel, architectural et construit de l’EPFL. «Actuellement, une majorité de bâtiments en Suisse sont en béton. La production de ciment y est responsable de 7% des émissions anthropiques de CO2. Le béton constitue 50% des déchets de démolition. En fin de vie, il est aujourd’hui, au mieux, réduit en gravier ou en granulats pour constituer de nouveaux bétons recyclés, ce qui demande à nouveau beaucoup d’énergie. A la place, découper et réemployer les blocs tels quels évite la production de nouveau ciment et la génération de déchet inerte. Le nouveau bilan carbone n’est pas nul mais est drastiquement réduit. Le ‘downcycling’ du béton obsolète est retardé», explique Corentin Fivet.

Les démolisseurs deviennent les nouveaux producteurs
Les démolisseurs, qui étaient jusqu’ici en bout de chaîne, deviennent les nouveaux producteurs de matière première, suivant les principes de l’économie circulaire. Ingénieur civil architecte, le chercheur s’intéresse aussi aux raisons menant à l’obsolescence du bâti construit et aux conditions architecturales favorisant la mise en œuvre de composants réemployés.

Appel à l’industrie
En attendant, les chercheuses et chercheurs de l’EPFL appellent le monde de l’industrie à passer à l’action. «Il n’existe pas de nouveau pont en béton ayant une empreinte carbone aussi basse que celui-ci. Imaginez que tout béton de structure obsolète soit réemployé en pièces et remplace une partie de la demande mondiale de béton neuf! Nous pourrions alors vraiment agir sur l’urgence climatique à laquelle nous devons faire face», souligne Corentin Fivet.

Texte : Smart Living Lab / EPFL Fribourg

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