Steffen Wienands (debout) en compagnie d’un autre scientifique dans le «Prosumer Lab» de la Haute école spécialisée bernoise. Image: BFH

Le réseau de distribution du Groupe E à Neyruz est un exemple de réseau électrique suburbain. Image: Stemutz.com

Le réseau de la société WWZ AG à Hochdorf (LU) fait office d’exemple pour un réseau électrique urbain. Image: commune de Hochdorf

Le réseau de distribution du Groupe E à Haut de Fiaugères (FR) est un exemple de réseau électrique rural. Image: Groupe E

Comportement d’un accumulateur de batterie programmé pour optimiser l’autoconsommation lors d’une journée ensoleillée. Illustration: rapport final OFEN

Comportement idéal d’un accumulateur de batterie programmé pour être utile au réseau lors d’une journée ensoleillée. Illustration: rapport final OFEN

Le tableau montre les avantages susceptibles d’être obtenus par une exploitation des accumulateurs en fonction des besoins du réseau. Tableau: rapport final OFEN

Profil de puissance sur le réseau de distribution de Neyruz lors d’une journée d’été en 2035. Le carré illustre l’énergie qui pourrait être absorbée par les accumulateurs installées. Image: rapport final OFEN

Projet de recherche sur les accumulateurs d’installations PV : Moins la structure du réseau de distribution est homogène, plus il est pertinent de disposer d’accumulateurs individuels

(BV) Une équipe de chercheurs de la Haute école spécialisée bernoise, en collaboration avec deux exploitants de réseaux, a étudié les effets des batteries sur les réseaux de distribution d’électricité et montré s’il était possible d’exploiter les batteries en vue de servir au réseau. Trois réseaux de distribution ont été utilisés à titre d’exemple: un réseau de distribution urbain à Hochdorf, un réseau de distribution suburbain à Neyruz, et un réseau de distribution rural à Haut de Fiaugères (Text auf Deutsch >>)


Aujourd’hui déjà, de nombreux propriétaires de maisons individuelles complètent leurs installations photovoltaïques (PV) par un accumulateur afin de pouvoir consommer eux-mêmes la plus grande partie possible de leur électricité solaire. Avec la poursuite du développement du photovoltaïque en Suisse, l’utilisation d’accumulateurs domestiques décentralisés devrait encore connaître une augmentation considérable. Les perspectives énergétiques 2050+ de l’OFEN prévoient qu’à long terme, environ 70% des installations photovoltaïques seront combinées à des accumulateurs.

Trois types de réseaux de distribution
Une équipe de chercheurs de la Haute école spécialisée bernoise - Technique et informatique (BFH-TI) à Bienne a étudié les conséquences de cette évolution en collaboration avec deux exploitants de réseaux électriques. Pour le projet soutenu par l’OFEN, trois réseaux de distribution ont été utilisés à titre d’exemple: un réseau de distribution urbain avec 78 immeubles à Hochdorf (canton de Lucerne), un réseau de distribution suburbain avec 164 immeubles à Neyruz (canton de Fribourg), et un réseau de distribution rural avec 19 immeubles à Haut de Fiaugères (également dans le canton de Fribourg). Les scientifiques ont reproduit les trois réseaux dans une simulation. Ils ont ensuite modélisé l’état du réseau pour l’année 2035.

D’ici 2035 70% des installations avec des batteries
Ils sont partis du principe qu’en plus des installations actuelles, un quart de toutes les surfaces de toit adaptées au photovoltaïque seraient couvertes par une installation PV d’ici 2035. Il a également été supposé qu’à cette date, 70% des installations seraient combinées à un accumulateur. Avec ces données et d’autres hypothèses sur le développement de la mobilité électrique et des pompes à chaleur, les chercheurs de la Haute école spécialisée bernoise ont modélisé les trois différents réseaux de distribution pour l’année 2035. Le logiciel d’analyse de réseau PowerFactory a permis d’estimer l’impact des différents modes de fonctionnement des batteries de stockage sur les réseaux.

Exploiter les accumulateurs en fonction du réseau
Le résultat du projet fait dresser l’oreille. «Aujourd’hui, tous les réseaux électriques ne sont pas suffisamment dimensionnés pour absorber la croissance souhaitée des installations photovoltaïques; certains d’entre eux pourraient atteindre leurs limites de charge en 2035», explique Steffen Wienands, scientifique à la Haute école spécialisée bernoise. Les lignes devraient être renforcées, notamment dans les zones rurales, afin de pouvoir faire face à la quantité d’électricité produite par les grandes installations photovoltaïques. La problématique de la charge du réseau ne serait pas non plus atténuée par l’utilisation d’accumulateurs pour optimiser l’autoconsommation, comme c’est généralement le cas aujourd’hui. Steffen Wienands: «Le mode d’exploitation de l’optimisation de l’autoconsommation ne fournit aucune contribution au délestage du réseau. En effet, si la consommation propre est optimisée, la batterie ne se charge souvent pas au moment où l’excédent photovoltaïque est le plus important (entendu comme la différence entre la production PV et la consommation actuelle). Malgré une autoconsommation élevée, les pics d’injection d’électricité photovoltaïque ne sont pas forcément réduits».

Chargés pendant les périodes de fort excédent photovoltaïque
La charge du réseau peut être contrée si les accumulateurs à batterie sont exploités de manière à être utiles au réseau (voir encadré). Cela est possible si les accumulateurs sont chargés pendant les périodes de fort excédent photovoltaïque, c’est-à-dire lorsque la production d’électricité photovoltaïque est nettement supérieure à la consommation. Le rapport final du projet de recherche le constate: «L’utilisation d’un algorithme d’équilibrage de charge adapté au réseau permet de réduire considérablement les surcharges des lignes et des transformateurs concernés et, dans de nombreux cas, de les éviter complètement. L’apparition de tensions trop élevées ou trop basses peut également être réduite de manière significative, mais pas complètement évitée».

Tous les accumulateurs ne se valent pas
Les résultats du projet de recherche montrent clairement que l’injection décentralisée de PV a des conséquences différentes dans les trois types de réseaux de distribution. Lorsque les toits d’une ferme sont équipés de modules photovoltaïques, des courants élevés circulent parfois jusqu’au point de raccordement au réseau le plus proche; dans ce cas, c’est la ligne d’alimentation qui est concernée en premier lieu en cas de surcharge. Des déséquilibres similaires se produisent dans les réseaux urbains avec quelques grandes installations photovoltaïques. Pour ces deux types de réseau, il est préférable de régler l’équilibrage de la charge des accumulateurs de manière décentralisée, c’est-à-dire à chaque fois au niveau de l’accumulateur.

Dans le cas d’un réseau suburbain
La situation est différente dans le cas d’un réseau suburbain: ici, les ménages se ressemblent en termes de production photovoltaïque et de consommation. Certes, des surcharges se produisent également sur ce réseau, mais elles concernent principalement les lignes principales et les stations de transformation. Dans ce cas, un équilibrage central de la charge est plus efficace. Pour ce faire, le comportement de charge des accumulateurs répartis sur le réseau pourrait être commandé de manière centralisée par le centre de contrôle du gestionnaire de réseau, la charge du transformateur dans la station de transformation étant mesurée et transmise au centre de contrôle. Le centre de contrôle régulerait les batteries sans délai de manière à réduire au maximum la charge du transformateur. Il s’agit d’un concept théorique qui n’a pas encore été appliqué dans la pratique du réseau électrique suisse.

Les différences entre les réseaux de distribution ont pour conséquence que l’accumulateur n’a pas le même impact sur la stabilité du réseau. Les chercheurs s’expriment ainsi dans le rapport final de l’OFEN: « Certains accumulateurs ont un effet positif important sur le réseau, d’autres n’ont qu'un impact limité. Moins la structure du réseau de distribution est homogène, plus il est pertinent de disposer d’accumulateurs individuels judicieusement positionnés.»

Faible incitation financière
Dans leur étude, les scientifiques de la Haute école spécialisée bernoise ont quantifié les avantages financiers d’une exploitation des accumulateurs à batterie en fonction du réseau pour le réseau de distribution. Ils en concluent qu’une exploitation des accumulateurs en fonction des besoins du réseau permettrait, non pas d’éviter des renforcements du réseau (lignes, transformateurs), mais de les reporter de plusieurs années. Ce décalage a un effet favorable sur le compte d’investissement des gestionnaires de réseau de distribution.

100 à 200 francs pour 10 kWh
Selon le calcul des chercheur, un accumulateur d’une capacité de 10 kWh pourrait être rémunéré de 100 à 200 francs lors de son installation si les gestionnaires de réseau transformaient cet avantage en une incitation financière pour les exploitants d’accumulateurs à batterie. «Il s’agit d’un montant relativement faible», explique le scientifique de la BFH-TI Stefan Schori. «Dans la mesure où les coûts d’investissement pour les accumulateurs sont élevés par rapport aux lignes et aux transformateurs et que les équipements de réseau doivent être remplacés d’une manière ou d'une autre à un moment donné, les exploitants de réseau tirent peu d’avantages financiers d’une exploitation des accumulateurs à batterie en fonction des besoins du réseau».

Groupe E étudie des tarifs dynamiques
La situation serait différente avec l’introduction de tarifs d’électricité dynamiques. Cela constituerait une incitation financière à l’exploitation des accumulateurs aussi en fonction des besoins du réseau. C’est exactement dans cette direction que pense le gestionnaire du réseau Groupe E (Granges-Paccot/FR), lequel a participé directement au projet de recherche. «Dans une prochaine étape, Groupe E examinera si un comportement de telles batteries pourrait être obtenu par le biais de tarifs variables selon l’heure», affirme Peter Cuony, responsable des produits dans la distribution d’électricité chez Groupe E. «Le gestionnaire du réseau de distribution pourrait par exemple annoncer la veille un tarif de prélèvement et de reprise variable selon les heures sur une interface Internet. Le système de gestion de l’énergie de la batterie pourrait consulter ce tarif et ainsi optimiser financièrement l’utilisation de la batterie pour son propriétaire».


Exploitation adaptée au réseau
Le mode de fonctionnement d’un accumulateur est dit «bénéfique au réseau» lorsque l’accumulateur est exploité de manière à délester le plus possible les pointes de puissance sur le réseau. Les processus de charge et de décharge sont contrôlés de manière à réduire les pointes puissances d’injection dans le réseau ou les pointes de prélèvement depuis le réseau. Pour atteindre cet objectif, le logiciel de contrôle peut par exemple intégrer des données de prévisions météorologiques afin d’estimer la production photovoltaïque pour les heures et les jours à venir.

«Les réseaux actuels disposent encore d’une capacité suffisante», explique Roman Tschanz, responsable du projet réseau chez la société WWZ Energie AG, laquelle exploite le réseau de distribution de Hochdorf étudié dans le cadre du projet BFH-TI. «Toutefois, les connaissances acquises dans le cadre du présent projet montrent également qu’une exploitation des accumulateurs adaptée aux besoins du réseau devrait jouer un rôle important dans l’extension future du réseau». BV


Texte : Benedikt Vogel, sur mandat de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN)

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