A la ligne de faisceau Tomcat de la Source de Lumière Suisse SLS, des chercheurs du PSI ont analysé les processus mécaniques dans cette cellule test d’une batterie solide. Image: Institut Paul Scherrer/Markus Fischer

Xiaohan Wu (à gauche), premier auteur de l’étude, et Federica Marone, spécialiste des lignes de faisceaux, à la Source de Lumière Suisse SLS du PSI. Image : Institut Paul Scherrer/Markus Fischer

PSI : Observer des batteries tout solides en train de se déformer

(PM) Des chercheurs de l’Institut Paul Scherrer PSI ont réussi à observer avec une précision inégalée à ce jour les processus mécaniques qui se jouent dans les batteries tout solides. Le recours à la tomographie aux rayons X leur a permis de découvrir le mode de propagation des fissures dans les matériaux qui constituent la batterie. Leurs conclusions pourraient permettre d’améliorer la sécurité et la performance des batteries des voitures électriques et des smartphones. Les chercheurs ont obtenu leurs résultats grâce à la Source de Lumière Suisse SLS. (Text auf Deutsch >>)


Des micropuces aux voitures électriques, en passant par les téléphones portables: pour tous ces engins, la société moderne a besoin des batteries. Elle attend de ces dernières qu’elles stockent le plus d’énergie possible, mais aussi qu’elles soient légères et sûres dans leur utilisation quotidienne, tout en étant rapidement rechargeables. A l’heure actuelle, ce sont les batteries à base de lithium-ion qui satisfont le mieux à ces exigences.

Mais il est devenu pratiquement impossible d’améliorer encore les batteries de ce type. Par ailleurs, les électrolytes liquides utilisés pour le transfert de charge dans ces batteries sont inflammables. Les batteries tout solides, en revanche, offrent plus de sécurité et d’autres avantages. Dans leur cas, les liquides sont remplacés par des électrolytes solides qui supportent des tensions et des températures de fonctionnement plus élevées. De ce fait, les batteries tout solides se rechargent et se déchargent plus rapidement. Par ailleurs, elles stockent plus d’énergie par unité de poids.

Toutes ces raisons font que les constructeurs automobiles, notamment, s’intéressent à l’optimisation des batteries tout solides. Mais pour l’heure, on ne comprend pas encore suffisamment les processus exacts qui se jouent dans ce genre d’accumulateurs de courant. Ainsi, les ingénieurs ne savent pas ce qui se passe à l’intérieur lors de la charge et de la décharge. «Si l’on veut continuer à développer les batteries tout solides, il faut comprendre les processus électromécaniques qui se jouent à l’intérieur», explique Xiaohan Wu, qui a conduit les analyses dans le cadre de son travail de doctorat dans le groupe de recherche Matériaux pour batteries et diagnostiques à l’Institut Paul Scherrer PSI.
Des chercheurs du PSI viennent de faire un pas décisif vers cet objectif dans le cadre d’un projet commun avec le constructeur automobile Toyota.

Des fissures qui barrent la route
L’intérieur des batteries solides étudiées est composé principalement de l’électrolyte solide, à base de sulfure. Cet électrolyte solide renferme des petites particules d’étain d’environs 30 micromètres de diamètre, soit la moitié de l’épaisseur d’un cheveu humain. Lorsque la batterie se recharge, les ions lithium réagissent avec les particules d’étain. Le lithium se fait alors un chemin à travers la structure cristalline de l’étain qui augmente considérablement de volume. Ce faisant, il génère des fissures dans l’électrolyte environnant. Ces fissures empêchent les ions de lithium d’avancer à travers l’électrolyte, ce qui limite clairement le rendement de la batterie solide.

Les chercheurs viennent de réussir à observer ces processus à la Source de Lumière Suisse du PSI grâce à ce qu’on appelle la microscopie à tomographie aux rayons X. «Sur le principe, la méthode fonctionne comme un scanner dans un hôpital, à la différence qu’au synchrotron du PSI, le flux de photons est plus important de plusieurs ordres de grandeur», explique Federica Marone. Cette spécialiste des lignes de faisceaux a contribué à perfectionner la méthode et été responsable pour l’étude de la réalisation technique à la ligne de faisceau TOMCAT de la SLS utilisée à cette occasion. «Cela nous permet d’atteindre la résolution spatiale et temporelle nécessaire pour suivre les processus qui se jouent à l’intérieur de la batterie pendant son fonctionnement», précise-t-elle encore.

Les chercheurs ont radiographié en temps réel la batterie pendant la charge et la décharge. Leurs prises de vue leur ont permis de constater que les particules d’étain se dilataient et que cette dilatation pouvait atteindre 300%. Ils ont également réussi à retracer le mode de propagation des fissures dans l’électrolyte. «Nous ne nous attendions pas à ce que les fissures se propagent précisément en croisant les ions lithium pendant leur avancée dans l’accumulateur», relève Xiaohan Wu. Ce déroulement contraint les ions à des détours extrêmes, ce qui inhibe fortement le processus de charge et de décharge.

Le matériau s’autorépare
Les chercheurs ont par ailleurs constaté que la batterie s’autoréparait pour ainsi dire lors de la décharge. Lorsque les ions lithium ressortent des particules d’étain, les fissures de l’électrolyte environnant se referment à nouveau. «L’électrolyte solide est élastique, précise Xiaohan Wu. C’est cela qui lui permet de s’autoréparer.» Il s’agira maintenant d’utiliser cette méthode d’analyse lors d’une nouvelle étape de recherche pour trouver d’autres matériaux électrolytes qui réagissent moins à la dilatation des particules d’étain.
«Les résultats de cette étude fournissent des indications importantes à l’industrie automobile pour le développement de batteries solides plus robustes et plus performantes», conclut Xiaohan Wu. Les chercheurs viennent de publier leurs résultats de recherche dans la revue spécialisée Advanced Energy Material.

Texte: Institut Paul Scherrer/Christina Bonanati

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