Pour aller puiser la chaleur contenue dans le sol, de l’eau est injectée à haute pression dans la croute terrestre. Elle est ensuite récupérée sous forme de vapeur et utilisée pour faire tourner une turbine puis produire de l'électricité. ©Photo : EPFL

EPFL : La présence d'eau dans les roches atténue la force d'un séisme induit

(SP) Des chercheurs de l’EPFL et de l’ENS Paris ont découvert que la présence de fluides sous pression dans le sol pouvait limiter l’intensité des tremblements de terre induits par certaines activités humaines souterraines, telles que la géothermie. Les résultats de l’étude sont publiés dans Nature Communications.


De l’ordre de cent mille enregistrés chaque année sur l’ensemble de la planète, les tremblements de terre ne sont pas tous d’origine naturelle. Certains – en général de force modérée – peuvent être déclenchés par des activités humaines menées dans le sous-sol. On parle alors de séismes induits. Afin de mieux en comprendre les mécanismes spécifiques, des chercheurs du Laboratoire expérimental de mécanique des roches de l’EPFL (LEMR) et de l’Ecole Normale de Paris ont mené une étude sur le rôle des fluides dans la propagation de ce type de secousses. Ils ont fait une découverte totalement contre-intuitive, c’est-à-dire qu’une forte pression de l’eau limitait l’intensité du séisme plutôt que de l’augmenter.

Séismes induits en Suisse liés surtout à la géothermie
Les séismes induits peuvent notamment être déclenchés par des activités comme l’exploitation minière, l’extraction de gaz ou de pétrole, le stockage de déchets toxiques ou de CO2, la construction de tunnels ou de lacs de retenue, et surtout la géothermie. Car en Suisse, les séismes d’origine humaine sont essentiellement liés à des projets visant à développer cette forme d’énergie renouvelable. Selon des chiffres du Service sismologique Suisse, une telle opération menée dans le sous-sol bâlois avait par exemple provoqué un séisme d’une magnitude de 3.4 en 2006. Un autre de magnitude 3.5 s’était produit à Saint-Gall en 2013.

Pour aller puiser la chaleur contenue dans le sol, de l’eau est injectée à haute pression dans la croute terrestre, à des profondeurs allant de 2 à 4 kilomètres. Elle est ensuite récupérée sous forme de vapeur et utilisée pour faire tourner une turbine puis produire de l'électricité. «Une telle manœuvre peut modifier l’équilibre des roches et agir sur les failles environnantes, favorisant ainsi le déclenchement de séismes locaux», explique Marie Violay, qui dirige le LEMR. Des séismes qui représentent un défi particulièrement important pour les tenants de la géothermie, relève Mateo Acosta, doctorant au LEMR et premier auteur de l’étude: «Même si ces tremblements de terre sont généralement de faible intensité, ils peuvent engendrer des dégâts et susciter des inquiétudes dans la population, qui peuvent aller jusqu’à faire capoter des projets.»

Absorption de chaleur
Le jeune homme a mené des essais visant à recréer les conditions d’un tremblement de terre, intégrant différents degrés de pression des fluides, afin d’étudier la manière dont ceux-ci influencent la dynamique des failles. Le chercheur s’est principalement intéressé à l’étape de la propagation d’un séisme, c’est-à-dire le moment où les deux plaques constituant la faille glissent l’une sur l’autre, générant des ondes qui se diffusent ensuite aux alentours.

«La friction des roches génère beaucoup de chaleur, et celle-ci participe à la propagation du séisme, décrit le doctorant. Cependant, lors de l’échauffement, cette chaleur est absorbée par l’eau en présence, et cette absorption d’énergie dépend fortement des paramètres thermodynamiques des fluides. Ce qui est ressorti de nos expériences, c’est que plus la pression initiale du fluide est proche de la pression critique de l’eau, moins le tremblement de terre sera fort.»

Paramètre crucial
« Cette étude a montré que le niveau initial de pression des fluides dans les roches est un paramètre crucial, surtout aux profondeurs où se déroulent les activités géothermiques, et que les modèles devraient donc davantage en tenir compte », décrit François-Xavier Passelègue, chercheur au LEMR et deuxième auteur de l’étude.

De nouvelles mesures encore plus précises de l’impact de la présence de liquide seront menées par la suite grâce à de nouvelles installations de pointe dont le laboratoire s’est récemment doté permettant la simulation des conditions de pression et de température régnant entre 10 et 15 kilomètres de profondeur dans la croûte terrestre.

©Texte : Sarah Perrin, Source: École polytechnique fédérale de Lausanne EPFL et Mediacom

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