Jacques Bonvin: "Ce qui est très clair c'est que maintenant la décision a été prise, non seulement par le Parlement ou par le Conseil fédéral, mais par le peuple. Maintenant la direction est prise, ça c'est super important pour la branche!"

Jacques Bonvin : „Heureusement que les Suisses n’ont pas cru aux ‘fakenews’ sur la loi sur l’énergie !“

(©AN) « Il y a six mois, j’étais persuadé que la votation sur la loi sur l’énergie passerait comme une lettre à la post. Mais avec les fausses informations que les opposants ont fait circuler, je me faisais de plus en plus de soucis…. », explique Jacques Bonvin, co-directeur de Solstis. Entretien sur le oui clair en faveur de la stratégie énergétique 2050.


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Anita Niederhäusern : La stratégie énergétique a été largement approuvée dimanche, en quoi ce résultat vous a-t-il surpris, vous vous y attendiez ?
Jacques Bonvin : Alors pour être honnête, il y a six mois en arrière pour moi c'était une formalité, le Parlement à plus de deux tiers avait dit oui, ça a été redressé par la droite etc, il n'y avait pas de risque. Puis, au fur et à mesure de la campagne, quand j'ai vu arriver le discours des opposants, comme ils s'appuyaient sur la peur de l'éolien, l'arrivée de Philippe Roch ancien directeur de l'Office de l'environnement, là tout d'un coup j'ai vraiment commencé à être un peu soucieux. Je me suis dit qu’on peut organiser une campagne totalement mensongère avec beaucoup de moyens et avec ça on peut guider - je ne suis pas politologue - je pense que c'est une des première fois en Suisse où l'on a quelque chose qui est autant objectivement malhonnête et qui est vraiment affiché comme ça. Avant on a eu les caricatures des moutons ou des minarets, mais cela restait des caricatures. Mais là c'était vraiment des chiffres et ils se battaient.

A l'émission Infrarouge, il y avait les opposants et en face Doris Leuthard qui s'était déplacée et deux conseillers nationaux. Le discoure a posé les questions du fondement même de la démocratie. Est-ce que on peut vraiment avec des 'fake news' comme ça guider à droite et à gauche comme on veut ? Il y a eu le recours de Gallus Cadonau qui n'a pas passé. Lui il a fait un recours contre le référendum, voulait annuler la votation parce que c'était des mensonges avérés. Et ça n'a pas été accepté. Et puis c'est vrai que je n'étais pas rassuré du tout quand les sondages donnaient plus que 52%. Alors c'était un sacré soulagement de voir que ça a passé à 58%. Mais six mois en arrière c'était pour moi quelque chose d'acquis. On n'en parlait pas. De plus l'initiative anti-nucléaire avec récolté 46%, je me disait la Suisse a tourné la page. Elle a effectivement tourné la page. Peut-être que c'était salutaire pour se dire attendez, le danger il vient de là.

Quelles sont les conséquences de ce vote pour Solstis? Qu'est-ce que ça va changer ?
Alors en même temps on en a eu plein de ces votations depuis 20 ans, le centime climatique, le centime solaire... Chaque votation que l'on avait c'était pour améliorer la situation, c'était pour nous donner un coup de pouce et on les a toutes perdues. Là c'est la première fois où c'était pas une votation pour améliorer, c'était soit on continue comme c'était lancé, soit on freinait. Pour nous ça aurait eu un impact énorme si ça avait été non parce que là le business que l'on fait actuellement avec les rétributions uniques, avec le système qui est en place, il était arrêté. Alors là il est simplement poursuivi.

Ce qui est très clair c'est que maintenant la décision a été prise, non seulement par le Parlement ou par le Conseil fédéral, mais par le peuple. Maintenant la direction est prise, ça c'est super important pour la branche en général, que ce soit pour le solaire ou pour l'isolation des bâtiments enfin pour l'énergie en Suisse. C'est très important. Immédiatement pour Solstis, ce qui va changer c'est dans l'esprit des clients, il n'y aura plus de doute. On est sur le chemin on avance, il n'y a plus d'arrières pensées, plus de craintes est-ce que ça va changer demain, est-ce que l'on va se prendre un coup sur la nuque. Pour nous ce qui va changer, il n'y a pas de changement radical, on va intensifier le travail avec les outils qui sont établis. Le gros du marché c'est la résidence individuelle, et là on va arriver avec toutes les solutions d'optimisation de l'auto-consommation que ce soit les batteries ou les pompes à chaleur. Donc là on va intensifier. Nous on a connu un peu tous les marchés, il y a eu l'industriel, puis l'agricole. On a toujours fait du particulier depuis 20 ans. Maintenant cela devient la plus grande part des projets, cela demande de traiter plus de projets plus rapidement, alors que si on a un gros projet tu transpires, on réfléchit beaucoup pour le monter et puis une fois qu'il est là ça donne du travail pour un moment.

Ce sera plutôt la villa individuelle ou les immeubles ?
Alors les deux. Il y a bien sûr les immeubles avec l'autoconsommation. Et là je vois surtout les nouveaux immeubles quand tu peux venir en amont directement au niveau du tableau électrique, au niveau de l'introduction. C'est clair dans les immeubles existants tu peux toujours modifier, mais on doit faire une modification dans le système, les compteurs ils sont là donc tu changes tous les compteurs. C'est clair que dans les PPE, on en a fait quelques unes, même si tout le monde était d'accord, le distributeur veut un compteur à double charge sur chaque locataire, enfin ça faisait des prix prohibitifs, c'était pas encourageant, c'était plutôt un frein. Alors que là maintenant on sait exactement ce que l'on doit faire à des coûts bien moindres.

Et les entreprises qui consomment beaucoup d’énergie ?
En même temps elles sont là depuis 2014, mais toujours avec cette appréhension, cette crainte, est-ce que ça va passer ? Maintenant le ciel est dégagé, quand on va voir un industriel, on peut vraiment lui proposer ça. Dans l'industrie, c'est clair qu'il y a un gros potentiel parce qu'il y a beaucoup de consommation. Et en même temps, un industriel qui s'engage pour 25 ans....

Plutôt pour 5 ans?
Et même 5 ans, surtout les industries lourdes qui consomment beaucoup, elles sont passablement fragilisées ou elles dépendent beaucoup du marché extérieur, du franc, de plein de choses. Nous proposons du contracting, c'est nous qui prenons le risque de la consommation de l'industriel, s'il consomme moins, c'est nous qui devons gérer ce risque. Et il y a des industriels qui sont d'accord de prendre eux-mêmes le risque, qui sont assez sûrs de ce qu'ils veulent faire, qui ont confiance.

L'ordonnance d'application se trouve encore en phase de consultation. Est-ce qu'il y a des maillons faibles que vous auriez
soulevés ?
Pour la RPC il y a deux variantes, la variante A pour tous ceux qui ont construit sans la décision, c'est la variante politiquement correcte, tous ceux qui sont partis avant on les mets dedans. Avec la variante B on reprend la liste d'attente jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'argent. C'est clair que politiquement la variante A est plus confortable, parce que tous les grincheux tu ne vas pas les avoir. Mais c'est donner le signal que ceux qui ont spéculé avant, c'est les gagnants d'aujourd'hui. Et l'argent qui pourrait être là pour construire de nouveaux projets... Voilà.

Nous on a toujours été super clair avec les clients quand ils voulaient faire quelque chose, nous ce qu'on peut vous dire c'est ce que l'on voit dans le rétroviseur. Demain? Jamais je peux vous garantir que dans trois ans ça va sortir. Parce que les gens qui ont construit en 2013, 2014 sans aval définitif de Swissgrid, la situation était claire pour tout le monde. Celui qui a trompé le client qui a fait miroiter au client qu'il fallait y aller, c'est celui-là qui va gagner. Là, je suis un peu idéaliste, mais je trouve que ce n'est pas correct. Mais je pense qu'ils ne vont pas prendre le risque d'avoir plein de paysans... en plus ils ont réussi à monter les paysans à gueuler contre le gouvernement, alors que ce n'est pas le gouvernement c'est les gens qui leur ont conseillé de faire ça : ‘Mais oui je vous fais les calculs dans deux ans on sort, boom vous devenez millionnaire’, on en a vu plein des feuilles exel... Là elle est l'hypocrisie et la malhonnêteté. Pour moi la Confédération elle était toujours clean, il n'y avait pas d'argent, il n'y avait pas d'argent. On pouvait s'insurger contre le fait qu'il n'y avait pas assez d'argent, j'étais le premier à le dire, mais les règles elles étaient connues. Alors voilà, la variante A, ça c'est le 'Realpolitik'.

Que dites-vous de la nouvelle étude de météotest que l'on peut garantir 50% de courant solaire en Suisse? Ça a été sorti par Swisssolar lors de la conférence photovoltaïque. (Voir ee-news.ch du 24.3.17 >>)
Je pense que c'est bien de donner ces chiffres, le potentiel est là. Mais il n'y a qu'à lever la tête et on voit bien que le potentiel est là. On a quand même une boule qui se lève tous les matins et qui nous amène 15000 fois plus d'énergie de ce que l'on a besoin. Après il faut arrêter de faire des calculs d'épiciers, il faut juste suivre.

Le prix du marché du courant a baissé à nouveau. L'hiver passé il était à plus de
100 euros/mkwh, il était remonté de 300% vu que les centrales nucléaires en Suisse et en France ont été arrêtées (voir ee-news.ch du 17.1.17 >>). Alors le prix qui monte en hiver et va probablement remonter l'hiver prochain, mais baisse en été, est-ce que ça a des conséquences pour le solaire ?
Je n'en vois pas directement, parce qu'aujourd'hui je paie mon électricité le même prix en été et en hiver et l'industrie aussi. Je ne connais pas la situation des tous gros consommateurs, mais la vue que j'en ai, on a un tarif annuel. Donc si je produis en été je vais économiser au même prix que si je produis en hiver. Pour moi en tant qu'installateur ou en tant que consommateur de solaire avec une installation sur ma maison, cela n'a pas d'impact. Puis maintenant pour les distributeurs, je ne veux pas parler à leur place, ils gagnent plus en été, ils perdent un peu en hiver.

Le prix des modules a baissé environ d'un facteur 10 en 10 ans, qu'en est-il pour le travail, pour le montage ?
Il n'a pas baissé d'un facteur 10, mais on a gagné en efficacité. Dans tout le processus, depuis les démarches administratives, la vente, la réalisation sur les chantiers, on est devenu beaucoup plus efficaces plus industrialisé.

Et dans une installation disons de 30 kw, la part du travail c'est quoi, c'est 40%? On peut l’estimer ?
En effet, c’est à peu près 40%.

Est-ce qu'on arrive encore à les baisser ?
Je pense qu'il faudrait déjà baisser la caisse maladie. Je pense qu'il y a encore des facteurs d'optimisation. Si on a plus de masse, plus de projets, on peut regrouper les projets dans une même région pour diminuer les transports. Il y a encore des niches d'amélioration, mais jusqu'à quand je ne sais pas. En fait on n'a jamais cessé de s'améliorer et je ne pense pas que l'on va s'arrêter aujourd'hui. Maintenant c'est difficile de dire exactement où. Au début c'était plus facile, maintenant c'est de l'affinage, un petit peu là, mais on continue. Les prix baissent aussi dans la main d'œuvre. Mais il y a aussi des coûts qui s'additionnent. Le coût de raccordement au réseau il a enflé. Cela dépend du distributeur, mais ça peut passer de 200 francs à 1000 francs. Et 800 francs de différence, ça fait des heures de boulot. Alors ce qu'on gagne d'un côté, ça monte de l'autre, sans parler de la Suva et des contrôles de sécurité. On vit dans une société où il faut tout contrôler, et ça a un prix et c'est beaucoup plus cher que la plaque de silicium.

Vous étiez à 50 employés et 30 mégawatt en 2015 c'est toujours la même chose ?
Au niveau des employés c'est la même chose, mais on a fait moins de mégawatts en 2016. On a fait plus de projets, mais moins de puissance car on a fait de plus petits projets. On devait être à 22.

Avec des chances que ça augmente avec la rétribution unique pour les 100 kW ?
Je pense que le marché peut augmenter. Cependant, il faut encore laisser digérer la votation. C'est clair que l'objectif c'est d'augmenter, parce qu'il y a du boulot et qu'on travaille, ça c'est sûr !

Et
Enormément de soleil aussi !

©Interview : Anita Niederhäusern, rédactrice en chef ee-enws.ch

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